Histoire

Etymologie

Hauteville la Guichard. D’où vient ce nom altier et sonore ? Dès le 12ème siècle,  Ordéric Vital parle du seigneur des lieux : Tancrède de Hauteville, désignation qui n’avait pas été choisie au hasard, mais adoptée par le bon sens populaire et portée comme nom dès que le territoire fût habité : Altavilla, nom géographique pouvant se traduire ainsi : agglomération sur une éminence. Ce qui est une évidence, car notre commune se situe sur les premières hauteurs dominant les marais du Cotentin.  Alta Villa figurait dans les anciennes chartes. La seconde partie du nom (la Guichard) donne lieu à plusieurs interprétations. Le suffixe proviendrait pour les uns d’une déformation de Guiscard (Robert Guiscard, personnage illustre né à Hauteville) et pour d’autres serait lié à Guichard de Montfort, seigneur possédant un fief important et des terres à Hauteville, et dont le château de Montfort était basé à Remilly sur Lozon à quelques kilomètres de chez nous.

Les formes différentes de Hauteville ont été les suivantes :

– Auteville

– 1643 Notre Dame de Hauteville (paroisse)

– 1700 Haulteville- la- Guichard

1787 Hautteville- la- Guychard

1789 Hautteville- la- Guichard

1790 Hauteville- le- Guichard (par assemblée nationale)

Puis Hautteville-la-Guichard, et enfin depuis 1983 (à la demande de l’IGN) Hauteville-la-Guichard.

HISTOIRE

La commune est le berceau d’un certain nombre de personnages ou familles illustres. Les plus illustres sont aucun doute “Les Hauteville”  en commençant par le père : Tancrède suivi de sa nombreuse descendance.

1-  Les Hauteville “dits les Tancrède”

Tancrède, descendant de Viking arrivé avec  Rollon en Normandie, vavasseur à la cour du Duc Richard II de Normandie, a été anobli pour un acte de bravoure. Au cours d’une chasse ducale, il tua d’un seul coup d’épée un énorme sanglier menaçant le Duc et lui sauvant ainsi la vie. Or, les codes de la chasse étaient très cadrés, il revenait toujours au plus haut placé dans la hiérarchie d’abattre la proie. Tancrède, n’ayant pas respecté ce rite, devant la crainte d’être déshonoré, prit la fuite. Mais devant cet acte, le Duc se montra à l’inverse reconnaissant et admiratif, l’anoblit en lui attribuant un fief à Hauteville et un détachement de 10 chevaliers.

Sur le fief situé sur une motte féodale au lieu dit “La Cave”, Tancrède de Hauteville eut  2 épouses Murielle et Fressende. De ces unions, il eut une très nombreuse descendance : 12 fils et 3 filles. De la 1ère union avec Murielle naquirent Serlon, Guillaume dit Bras de Fer, Dreux (aussi appelé Drogon), Geoffroy et Onfroy. Veuf, il se remaria avec Fressende qui lui donna  sept fils : Robert (Guiscard), Mauger, Guillaume le Jeune, Humbert, Auvray, Tancrède et Roger ainsi que 3 filles : Emma, Fressendine et Fressende.

Formés aux métiers de la chevalerie et aux arts militaires,  tous ces jeunes gens grandissaient avec un grand désir d’aventures, car le fief familial trop petit pour cette nombreuse descendance, poussait les jeunes gens à chercher au loin la fortune et la gloire. Partant en groupes et faisant des pèlerinages en terre sainte, se fiant à leur épée, ils traversaient la péninsule italienne  que se disputaient trois puissances : l’Empire Germanique, l’Empire Byzantin et la Papauté. Ils louaient leurs bras dans cette région, protégeant les populations locales menacées des attaques sarrasines et leur efficacité fût très vite remarquée. Les premiers à quitter le fief hautevillais vers 1030, furent Guillaume Bras de Fer, Dreux et Onfroy. Grâce à leur habilité militaire et la confiance qu’ils inspiraient, ils vont vite par le jeu des mariages et des alliances, gagner des territoires importants jusqu’à obtenir les titres de Comte, puis de Duc de Pouilles (également appelée Apulie), puis de Calabre et enfin de Sicile.

Ce fût au tour de Robert dit “Le Guiscard” (c’est à dire l’avisé, le rusé), arrivant à son tour vers 1045, va chasser les Grecs et les Arabes pour fonder un royaume normand avec l’aide de Roger, le plus jeune frère.

Après avoir obtenu la reconnaissance du Pape, Robert et Roger vont conquérir, sur mission papale, la Sicile alors musulmane. Roger fera de Troina (ville jumelle) la 1ère capitale normande au bout de 10 ans de guerre acharnée suivies d’années  de pacification. La domination normande commence et rapidement les rudes guerriers se transforment en princes civilisateurs aussi tolérants que cosmopolites. Ils garantissent la liberté de culte, ils cohabiteront et gouverneront avec les Musulmans. Une grande période de prospérité s’ouvre alors en Sicile. Les échanges commerciaux furent dynamisés entre l’Orient et l’Occident, l’industrie de luxe va atteindre de hauts rendements (tissage, sériculture). La culture du coton et de la canne à sucre furent activement développées. Les arts et les sciences vont  prendre une part très importante : poètes, architectes, géographes, médecins et astrologues vont fréquenter assidûment la cour de Palerme où l’on parlait le français, l’italien, le provençal, le grec, le latin et l’arabe.

Roger II a créé l’Ecole de Médecine de Salerne, l’une des plus réputée en Occident.

Roger II, fils de Roger 1er et petit fils de Tancrède, deviendra le 1er roi normand de Sicile. Cette formidable épopée durera pratiquement 200 ans.  Elle a fait l’objet de nombreuses recherches des historiens. De nombreux ouvrages historiques et littéraires sont consacrés à cette saga. (Pierre AUBE, Louise FLATTET, Michel SUBIALA etc).

Robert Guiscard partira même à la conquête de Byzance et tentera  de s’emparer du Titre d’Empereur, sa fille ayant épousé Constantin, le fils de l’Empereur Michel VII. Mais sans succès.

Quant à Bohémond, fils aîné de Robert,  à l’appel de la Croisade de 1097, il s’emparera en 1098 d’ANTIOCHE (située aux confins de la Turquie, du Liban et la Syrie actuels) pour y fonder une principauté qui va durer 200 ans.

Un lieu de mémoire situé dans l’ancien presbytère communal, géré par la communauté de communes est dédié à cette famille qui a laissé de très nombreux vestiges dans toute l’Italie du Sud. Nombreux châteaux en Pouilles, Calabre et Sicile, Palais des Normands à Palerme (actuel parlement sicilien), St Jean des Ermites, la Ziza, la Cuba, la très belle cathédrale de Monreale ainsi que celle de Cefalù. Ces normands ont été de grands bâtisseurs.

Les Hauteville grâce aux fruits de leurs conquêtes,  sollicités par l’évêque Geoffroy de Montbray, ont aussi fortement contribué financièrement à la construction de la cathédrale de Coutances.

Il est à noter que le royaume de Sicile, créé par cette famille perdurera jusqu’en 1860, c’est à dire jusqu’à la naissance de l’unité italienne.

2- Jean HEROARD (ou HEROUARD)

Né le 22 juillet 1551 à Hauteville, décédé en 1628, formé à la faculté de médecine de Montpellier, l’une des plus prestigieuse de cette époque, il a été le médecin personnel du roi Louis XIII à compter de la naissance de celui-ci jusqu’à sa mort, il restera donc 27 ans au service du Roi, dont il  a été également le conseiller.  Il a  également rédigé plusieurs ouvrages dont un” journal sur l’enfance et la jeunesse de Louis XIII”. Manuscrits originaux publiés par la librairie parisienne Firmin Didot dont la commune s’est  portée acquéreuse pour les restaurer. Très intéressé par l’hygiène, il consignait très méticuleusement des observations sur la santé du roi, mais aussi sur son éducation.

Il est l’instigateur du Jardin des Plantes à Paris, autrefois appelé “jardin royal des plantes médicinales”. Il est également considéré comme l’un des pionniers de la médecine vétérinaire en temps que médecin spécialiste des chevaux (hippiatre) et en ayant rédigé des traités d’ostéologie (étude des os de chevaux).

3- M. DANCEL, sieur du TOT

Architecte natif de Hauteville, fit construire l’aqueduc de Coutances, avec ses propres deniers pour apporter l’eau captée au niveau des sources de Cambernon à Coutances. Une plaque située sur le perron de l’Hôtel de Ville  rappelle sa mémoire. Il était propriétaire du Manoir de la Rivière.

4- Le Marquis Julien Anne Hyacinthe de Marnière de GUER (1740-1816)

Dernier Marquis de Marigny et Hauteville où il fit édifier un château (1782-1783), aristocrate très fortuné et royaliste, très actif avant la révolution.Il était connu pour ses positions assez radicales, car il appartenait à un groupe de personnes à l’origine des premiers troubles en 1788 en Bretagne.  Entretenait une correspondance épistolaire en temps qu’agent royaliste avec le Prince de Condé, a rédigé un ouvrage sur la finance. Mais, il dût émigrer vers l’Angleterre sous la Terreur. Ses biens furent confisqués comme biens nationaux et le château a été en grande partie démembré. Seules subsistent les dépendances à l’heure actuelle ainsi que l’ancienne ferme de ce château.

5- Henriette HELLOUIN D’ANJOU, qui a tenu une place importante dans la chouannerie. Elle venait chez sa soeur Françoise DUPREY au manoir de Vanloue. Lorsqu’elle y était, le manoir de Vanloue était un lieu de rencontres avec les chouans et servait de “boîte à lettres” pour les missives à destination de l’Angleterre. Activités qui lui ont valu quelques séjours en prison.

6- l’abbé Pierre LECARDONNEL, archiviste du diocèse de Coutances et Avranches, archéologue, né 23 mai 1811, décédé en 1871.

7- Louise FLATTET, institutrice du village à compter des années 1930 pendant toute sa carrière. Hauteville lui doit d’avoir écrit et publié en 1938 une remarquable monographie intitulée “Le pays des Tancrède”, introuvable désormais, mais réédité et complété d’un cahier supplémentaire en 2012 réalisé par la municipalité. Elle a fortement contribué à la découverte et à la reconnaissance de la famille de Tancrède par le biais du Souvenir Normand portée par M SOUDAN de PIERREFITTE. Cette reconnaissance se traduira  par la pose d’une plaque commémorative de cette épopée dans l’église intitulée” La Normandie Reconnaissante”.